Dans la lutte contre le changement climatique, capturer et stocker le carbone (CSC) apparaît pour certains comme une solution miracle. Alors que les émissions mondiales de gaz à effet de serre continuent de croître, cette technologie se présente comme une solution potentielle pour contribuer à les réduire, surtout dans des secteurs difficiles à décarboner comme l'industrie lourde. Mais peut-on réellement compter sur le CSC pour combler les failles de la transition énergétique, ou risquons-nous de faire face à des défis financiers et environnementaux qui limiteraient son impact ?
Capture et stockage du carbone : une nécessité pour atteindre la neutralité
La CSC consiste à capter du CO₂, soit à la source (usines, centrales), soit directement dans l’atmosphère, pour le stocker dans des formations géologiques comme des cavités salines, des réservoirs souterrains de pétrole, ou du gaz naturel.
Ces techniques sont capitales pour réduire les émissions résiduelles d’industries fortement polluantes. L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) estime que, pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, le CSC devra capturer et stocker environ 7,6 gigatonnes de CO₂ par an d'ici 2050.
Certaines initiatives progressent, comme le projet Northern Lights en Norvège, l’une des installations les plus ambitieuses, visant à stocker jusqu’à 1,5 million de tonnes de CO₂ annuellement dans des formations géologiques marines.
Ce projet pourrait faire office de modèle pour les autres pays européens et souligner le rôle des partenariats public-privé dans la diffusion de cette technologie.
Les grands projets mondiaux : pionniers de la CSC
En dehors de la Norvège, le Canada et les États-Unis investissent également dans des projets d’ampleur. Aux États-Unis, les compagnies pétrolières explorent des moyens d’intégrer la CSC dans leurs processus d’extraction et de raffinage pour réduire leur empreinte carbone.
Le Canada a, pour sa part, mis en place plusieurs infrastructures de capture de carbone, avec le soutien de gouvernements locaux pour diminuer les émissions de l’industrie pétrolière.
De tels partenariats encouragent les entreprises privées à investir dans la technologie, tout en mutualisant les coûts élevés des infrastructures et en facilitant les échanges d'expertise.
Les investissements se poursuivent aussi en Asie, où des initiatives émergent pour capturer les émissions des grandes installations industrielles. Le Japon et la Chine explorent des solutions locales pour gérer le stockage de CO₂ dans des réservoirs souterrains, une voie essentielle dans une région où les émissions restent parmi les plus élevées au monde.
Les défis techniques, économiques et environnementaux du CSC
Le coût de la capture du carbone reste un obstacle important, car capturer une tonne de CO₂ coûte actuellement entre 50 et 100 dollars USD. Ces coûts découragent de nombreux industriels et entravent l’adoption de la CSC, malgré la présence de subventions dans certains pays.
Le stockage du carbone présente également des défis géologiques, car toutes les régions ne disposent pas de formations géologiques appropriées pour le stockage à long terme.
En outre, le transport du CO₂ capturé représente une problématique supplémentaire : acheminer le gaz vers les installations de stockage nécessite des infrastructures spécifiques, souvent coûteuses et complexes.
Enfin, le stockage de grandes quantités de CO₂ pourrait entraîner des risques de fuite, un problème qui nécessite des régulations strictes et des systèmes de surveillance rigoureux pour garantir la sécurité environnementale.
Un levier pour la transition énergétique, mais insuffisant seul
Malgré ses limites, la CSC reste un outil très intéressant pour atteindre les objectifs de décarbonisation, notamment pour les secteurs où la réduction des émissions reste complexe, comme l’industrie lourde et la production de ciment.
Les études du GIEC soulignent le rôle complémentaire de la CSC pour les technologies de production d’énergie renouvelable, qui ne peuvent, à elles seules, atteindre une neutralité carbone d’ici 2050.
En matière de réduction des émissions de CO₂, les projets de CSC pourraient capturer entre 5 et 10 gigatonnes par an d'ici 2050, selon les estimations optimistes.
À titre de comparaison, les énergies renouvelables comme l'éolien et le solaire sont prévues pour éviter environ 20 à 30 gigatonnes d'émissions par an dans le même laps de temps, tandis que des solutions comme la reforestation contribuent potentiellement à 3 à 5 gigatonnes par an.
Cependant, pour que le CSC devienne une solution pleinement efficace, des avancées dans la recherche sur les méthodes de capture et des infrastructures de stockage, de même que des mesures de soutien économique, seront nécessaires.
En s’intégrant dans un mix de solutions technologiques variées, le CSC pourrait devenir un pilier de la transition énergétique mondiale.
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